Les villae à la campagne

En périphérie de Lousonna se trouvent quelques villae ; il s’agit soit d’exploitations agricoles plus ou moins importantes (villae rusticae) soit de riches demeures de villégiature qui n’ont à priori pas de fonction agricole (villae suburbanae).

Cinq résidences suburbaines ont, pour l’instant, été découvertes aux abords immédiats de l’agglomération antique. Une à l’extrémité orientale, deux maisons voisines dans la périphérie occidentale, une à flanc de colline au nord-est et une dernière sur la colline du Bois-de-Vaux.


Un peu à l’est du débouché du Flon, une vaste demeure est mise au jour lors des travaux en vue de l’exposition nationale de 1964. Elle date de la fin du 2ème siècle et est équipée de deux pièces chauffées. La qualité des sols retrouvés, de ses équipements, sa construction soignée et ses grandes dimensions indiquent qu’il s’agissait d’une demeure privée luxueuse établie tardivement à l’écart du centre-ville.



Villa suburbaine à absides découverte à l'est du Flon. © Archéologie cantonale.

Les deux maisons voisines du côté occidental du vicus ont été découvertes en 1984 et ont un plan similaire,  elles ont été construites entre la fin du 2ème siècle et le début du 3ème siècle de notre ère. Leurs pièces s’articulent le long d’une vaste cour en plein air qui devait accueillir les activités domestiques et probablement artisanales. Au début du 4ème siècle, l’une de ces habitations va s’équiper de véritables thermes, avec bassin froid et baignoire, il s’agit du seul exemple de thermes privés mis au jour à Lousonna.

Ce plan de maison, avec des pièces qui s’agencent le long d’une vaste cour, semble se retrouver pour la villa du Bois-de-Vaux. Ses vestiges, très partiels, ont été découverts entre 1922 et 1923.



Fouille de l'une des deux villas suburbaines voisines à l'ouest de la ville antique en 1985.


Bassin du frigidarium de l'une des maisons à l'ouest de Lousonna, il revêtu de carreaux de terre cuite.

Quelques vestiges de la villa suburbaine dite de Contigny ou de Champ d’asile ont été mis au jour à la fin du 19ème siècle puis lors de fouilles en 1968. Une restitution faite grâce aux maigres découvertes permettent de proposer le plan d’une villa à péristyle de près de 100 mètres de largeur. C’est dans cette villa qu’un graffiti, désormais visible au musée, a été découvert. Il s’agit d’un palindrome – phrase qui peut se lire dans les deux sens – écrit en grec ; il témoigne de l’éducation classique et du bilinguisme des élites de Lousonna. D’autres graffitis, mentionnant un certain Quintinius, y ont été découverts ; il pourrait s’agir du propriétaire qui aurait donné son nom au lieu-dit Contigny.



Graffito d'un palindrome écrit en grec découvert dans une villa proche du théâtre.

Les exploitations agricoles, quant à elles, se trouvent dans l’arrière-pays ; si certaines sont de vastes fermes de tradition indigène, d’autres abritent des résidences véritablement luxueuses.

À la fin du 19ème siècle a été découverte la villa de Cheseaux En Buy. Cette exploitation se divise en deux parties distinctes, la pars urbana, où vit le propriétaire et sa famille, et la pars rustica, où se trouvent les aménagements utiles à la production de l’exploitation. En l’occurrence, pour cette villa, il s’agit au moins d’un vaste atelier de forge gallo-romain, le reste de la pars rustica n’est pas connu. Cette exploitation à subi trois phases de transformations, la première, construite en matériaux périssables et datée de l’époque augustéenne est presque inconnue. 



Évocation de l'atelier de forge, on distingue en arrière-plan le corps central de la villa. © Archéologie cantonale, dessin de Bernard Reymond.

Elle sera remplacée, vers le milieu du 1er siècle par un bâtiment maçonné rectangulaire auquel fera suite, dans le courant du 2ème siècle, une construction monumentale constituée de trois ailes entourant une cour à péristyle. Mesurant 90 mètres de façade, la nouvelle villa est dotée d’une cour-jardin agrémentée de pièces d’eau, de décors somptueux tels que mosaïques ou peintures murales, placages de marbre, colonnes… Une telle évolution architecturale, qui s’observe largement au nord des Alpes à cette même époque, est révélatrice de la réussite économique et/ou politique du propriétaire de la villa.



Mosaïque découverte dans la villa de Cheseaux En Buy, aujourd'hui visible dans le vestibule de la villa Mon-Repos à Lausanne. © Archéologie cantonale.

À Crissier-Montassé, une villa de 70 mètres de façade, connue dès le 19ème siècle, a livré les vestiges d’une grande cave, une pièce rarement attestée dans les villae. La cave semble avoir été assez rapidement comblée (en raison de l’humidité) mais aurait pu accueillir, en plus de sa fonction de stockage, des rituels religieux, comme cela a pu être le cas dans d’autres caves de l’Empire romain. Le fait d’avoir découvert à proximité de ce local un bas-relief de déesse-mère permet d’envisager une vocation religieuse pour le lieu.



Cave de la villa de Crissier-Montassé en cours de fouille. © ASA, UNIL.

Enfin, à Pully, une immense villa a livré les vestiges les plus remarquables des environs de Lousonna. Il s’agit de la plus grande fresque découverte in situ connue à ce jour en Suisse romaine. La villa se monumentalisa dans le premier quart du 2ème siècle de notre ère, on y construit notamment deux pavillons hémicycliques sur deux étages et s’ouvrant sur des jardins. Cette villa témoigne, par le soin apporté à la construction, aux choix ornementaux et architecturaux, du goût raffiné de son propriétaire et des moyens financiers importants mis en œuvre pour sa réalisation.



Proposition de restitution de la villa romaine de Pully. Numérisation de Bernard Reymond d'après un dessin de Pierre André.