Le sanctuaire

À chacun ses idoles

Accolé au côté oriental de la basilique s’élève un sanctuaire qui a subi plusieurs transformations au cours des deux premiers siècles de notre ère. Il se présente sous la forme d’un temenos – un enclos sacré – à l’intérieur duquel se trouvent d’abord des constructions en bois qui ont laissé place à des constructions en maçonnerie par la suite. Le long de la rue, le mur est percé de deux ouvertures qui permettent d’accéder au lieu de culte légèrement en contrebas. Divers locaux sont construits dans ce temenos, l’un de ceux-ci, pourvu d'un sol en mortier et de murs peints en rouge a livré une statuette de Mercure, divinité protectrice des marchands et du commerce.



Statuette en bronze représentant Mercure, découverte dans l'un des locaux du sanctuaire.

Au centre de cet enclos se dressent trois petites chapelles d’environ 2,50 x 2,75 mètres qui abritaient très probablement les effigies de différentes divinités. Une inscription découverte dans la chapelle septentrionale mentionne Neptune, une divinité romaine qui, à Lousonna, se confond avec un dieu indigène et protège les marins naviguant sur mer mais aussi sur le Rhône et le Léman.

Une autre inscription votive dédiée à Hercule et faite par un sévir augustal – prêtre en charge du culte impérial – a été retrouvée à proximité de la chapelle du milieu. La dernière chapelle est elle aussi attribuée à Neptune puisqu’un autel mutilé dédié à la divinité des eaux par les bateliers du Léman y a été découvert à proximité.

Au vu de l’importance considérable que revêtait le commerce à Lousonna, il n’est pas surprenant qu'un sanctuaire dédié à Mercure et Hercule – divinités protectrices des commerçants et des matelots – trouve naturellement sa place sur les rives du lac, à proximité du port et de la place publique. 



EX VOTO SUSCEPT[O] NEPTUNO SACR(UM) T(ITUS) NONTR(IUS) VANATACTUS V(OTUM) S(OLVIT) L(IBENS) M(ERITO) Dédié à Neptune par Titus Nontrius Vanatactus, à la suite d'un voeu dont il s'est volontiers acquitté.

Les religions de Lousonna 

La pluralité des cultes pratiqués à Lousonna rend compte des multiples influences qui se sont exercées sur ses habitants et démontre également de l’ouverture de la société gallo-romaine face aux religions étrangères.

La religion romaine s’implanta de façon partielle à Lousonna ; si en effet le culte obligatoire de l’empereur est bien attesté au travers de plusieurs inscriptions, les noms latins et les représentations classiques des divinités gallo-romaines cachent en revanche le plus souvent des dieux indigènes. Ainsi Neptune, Mercure, Hercule, Cérès, Apollon, Minerve et Diane, attestés à Lousonna et honorés dans toute la Gaule, prêtent leur visage aux dieux gaulois tandis que les divinités typiquement gauloises telles que Epona – patronne des cavaliers et des voyageurs mais aussi garante de fécondité –, les Suleviae ou les déesses-mères restent plus proches des habitants.

Le culte obligatoire de l'empereur, élément d'unification et de "romanisation" à travers tout l'empire est attesté à Vidy par plusieurs inscriptions sous diverses formules. Nous trouvons pro salute Caesarum : pour la sauvegarde des Césars, formule employée pour désigner les membres de la famille julio-claudienne; pro salute Augustorum : pour la sauvegarde des empereurs et numinibus Augustorum : aux génies, au souffle divin des empereurs (formules utilisées entre la fin du 2ème et le début du 3ème siècle); in honorem domus divinae : en l'honneur de la maison impériale – formule attestée à partir du 3ème siècle.  

Quelques adeptes des cultes orientaux et même égyptiens, étaient établis à Lousonna. Un sistre en bronze, très probablement agité telle une crécelle lors de processions en l'honneur d'Isis a été retrouvé à l'est du Flon en 1936. De même une petite hachette votive portant une inscription consacrée à "Isis Leusonna" rend perceptible le métissage de cultes exogènes avec les pratiques religieuses à Lousonna.

La diversité des cultes rendus à Lousonna, véritable carrefour de routes marchandes et lieu d'échanges ne surprend pas; le lien étroit que certaines divinités ont avec le lac, le commerce, les transports et la prospérité ne fait que confirmer l'importance de l'activité commerciale du lieu.